Séance à la demande pour les scolaires / périscolaires

De Gilles Weinzaepflen
Documentaire - France - 2019 - 1h14
LE LISERE VERT LA FRONTIERE DEPLACEE
Une frontière matérialisée par 4056 bornes, posées sur notre territoire après la défaite de 1870. Elles marquent la limite des provinces perdues de l’Alsace-Lorraine. Ces bornes forment aujourd’hui une cicatrice intérieure, un no man’s land de la mémoire que j’arpente. Que me disent-elles de mon histoire ? Des relations de voisinage franco-allemandes ? De notre horizon commun, l’Europe ? Suivre le bornage sur la crête des Vosges puis dans le bassin lorrain, à la rencontre des paysages et des habitants. Bâtir un itinéraire de pensée, pour offrir une visibilité et un statut à cette frontière oubliée, en faire un monument.
Lycée
« La genèse de ce film a commencé là, il y a cinquante-quatre ans, puisque je suis né à Mulhouse. Et le Bel-Air est le premier cinéma art et essai où je suis venu adolescent. J’y avais vu Orange mécanique et Barry Lindon , en 1980, lors d’une rétrospective Kubrick. Et je vois que cette salle s’appelle William Wyler, alors elle me tient encore plus à cœur… » Pour Gilles Weinzaepflen , la présentation du Liseré vert , dimanche au Bel-Air, a pris une tonalité particulière, un petit parfum de madeleine de Proust totalement raccord avec le sujet de son film. Car dans le Liseré vert il n’est question que de mémoire, de traces qui s’effacent dans le paysage et dans les esprits. Et que le cinéaste ravive à travers ses images, superbes (œuvres d’un chef opérateur artiste, Tristan Bordmann, également né à Mulhouse…), rythmées par un texte sensible et foisonnant où tout se mêle comme dans un rêve : l’histoire – la grande, la petite, la familiale —, la géographie, les souvenirs, les rencontres. « Ce n’est pas un documentaire historique, prévient d’emblée Gilles Weinzaepflen, plutôt une sorte de poème. » Le cinéaste y part sur les traces des 4056 bornes posées en 1871, de la Suisse au Luxembourg, pour marquer la nouvelle frontière franco-allemande, à la suite du traité de Francfort. Des bornes oubliées, envahies par la végétation, parfois déplacées pour agrémenter des jardins, parfois arrachées pour construire des contournements routiers. Ces bornes qui s’égrènent le long des 540 km d’une frontière oubliée (marquée par un liseré vert sur les cartes anciennes) sont à l’image de cette histoire. Enfouie, non dite. Dans la famille de Gilles Weinzaepflen, l’arrière grand-père, Joseph, n’avait que 5 ans lorsqu’il s’est réveillé allemand en 1871, mais il ne l’a jamais accepté. Dans la légende familiale, telle que nous la raconte Le liseré vert, il était vu comme un héros, pour avoir apposé sur la porte du restaurant L’aigle d’or, qu’il tenait rue du Sauvage, un panonceau « Interdit aux Allemands », et cela en pleine première guerre mondiale. En refaisant l’histoire au fil des bornes, Gilles Weinzaepflen a appris que la ville avait changé plusieurs fois de mains en août 1914 et que le panneau avait vraisemblablement été posé pendant ces quelques jours où Mulhouse était redevenue française… Le jeune William Wyler, futur réalisateur de Ben-Hur, dont la famille tenait une bonneterie non loin de L’Aigle d’or, a aussi raconté ces nuits d’août 1914 où les Mulhousiens ne savaient jamais s’ils réveilleraient allemands ou français. Pour Gilles Weinzaepflen, la double culture de Ben-Hur, juif élevé comme un romain, le rapproche de cette histoire. Et voilà comment Le liseré vert, au fil des vagabondages de la pensée, nous conduit jusqu’à Hollywood… Mais revenons à cet arrière-grand-père, Joseph Schultz. Héros ou pas, « j’aimais bien ce personnage qui ne parlait pas français, a vécu la plus grande partie de sa vie dans l’empire allemand mais qui, pourtant, se sentait français », a raconté Gilles Weinzaepflen à l’issue de la projection. « Pour moi, cela déconstruit tout ce qu’on dit sur l’identité nationale. » Bien plus que la langue, l’histoire ou la géographie, « c’est le désir qui détermine cette identité », estime le réalisateur. (...) L'Alsace