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Sortie nationale Avant-Première

De Hirokazu Kore-eda avec Sakura Ando, Eita Nagayama, Soya Kurokawa, Hinata Hiiragi, Yuko Tanaka, Mitsuki Takahata, Akihiro Kakuta, Shido Nakamura
Thriller Drame - Japon - 2023 - VOST - 2h06

L'Innocence

Le comportement du jeune Minato est de plus en plus préoccupant. Sa mère, qui l’élève seule depuis la mort de son époux, décide de confronter l’équipe éducative de l’école de son fils. Tout semble désigner le professeur de Minato comme responsable des problèmes rencontrés par le jeune garçon. Mais au fur et à mesure que l’histoire se déroule à travers les yeux de la mère, du professeur et de l’enfant, la vérité se révèle bien plus complexe et nuancée que ce que chacun avait anticipé au départ…

Avant-première le 26 décembre.

La société japonaise est réputée autant pour sa manière feutrée de nier les problèmes que la cruauté avec laquelle elle peut traiter ses propres habitants. Cette fois, le propos s’engage autour de la figure d’un pré-adolescent, atteint d’un mal curieux qui le pousse à s’accuser d’être un monstre. Il donne à voir des comportements des plus étranges, qui laissent penser petit à petit qu’il cache un secret macabre, bien gardé au fond de lui. Sa mère, pourtant attentive à chacun des gestes de son fils, ne comprend pas. L’inquiétude est lisible dans le regard qu’elle porte sur son enfant. La vie courante se trouve alors imprégnée, sans jamais aucune forme de démonstration, du basculement psychique dans lequel son fils est en train de sombrer. Jusqu’au moment où cette monstruosité révèle des maltraitances graves d’un enseignant que l’école pourtant va désespérément couvrir. Kore-Eda est un conteur merveilleux. Il écrit trois récits, du moins trois témoignages des mêmes évènements qui interrogent à chaque fois la monstruosité supposée des personnages. On retrouve d’abord dans sa manière de filmer le génie de l’écriture filmique où chaque détail de la vie quotidienne se transforme en un évènement dramatique majeur. Le piano enfle petit à petit, tout au long de la narration, à mesure que la vérité se fait jour. Mais quelle vérité ? Chaque protagoniste se voit interrogé sur son droit à faire advenir la parole juste. Pour autant, les personnages sont enfermés dans un système social complexe où la vérité n’est jamais bonne à dire et à assumer et le destin des gens se scelle dans des compromis à la limite de la loi et des droits de l’homme. La mise en scène est dense, exigeante. L’apparente répétition des choses ressemble à un labyrinthe complexe où le spectateur se perd et se retrouve en fin de film. La cruauté du regard de Kore-Eda est majeure dans sa manière d’aborder son rapport à la société japonaise. Monster devient presque un témoignage politique sur la nécessité de faire évoluer les droits des minorités, des usagers des services publics et des professionnels de l’enseignement. Le cinéaste talentueux parvient à rendre lisibles et cohérents les enjeux de reconnaissance qui traversent tous les personnages comme le statut des mères isolées, les sexualités non conformes et les pédagogues innovants. Pour autant, la tonalité générale de la fiction ne sombre pas dans la démonstration forcenée. Le réalisateur filme de magnifiques paysages, couplés à des visages ou des corps appréhendés de très près par la caméra. Monster est en soi une illustration de la magie du métier de scénariste. On ressort de ces deux heures émerveillé par la capacité du cinéma à entraîner le spectateur dans des ressorts dramatiques insoupçonnés. Les personnages sont tous très attachants, comme si, à travers leur destin, se jouait celui d’un Japon condamné à se moderniser et à repenser ses fonctionnements. A voir à Lire

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